Les défaillances de la DGSE en matière de renseignement au Niger
La Direction générale de la sécurité extérieure [DGSE] a été vivement critiquée ces derniers mois pour ne pas avoir anticipé le coup d’État qui a renversé le président nigérien, Mohamed Bazoum, le 26 juillet 2023. Pourtant, d’autres services de renseignement, y compris américains, n’ont pas non plus été en mesure de prédire cet événement. L’ambassadeur de France au Niger, Sylvain Itté, a apporté des explications lors d’une audition à l’Assemblée nationale, en novembre dernier.
Les limites de la DGSE face au renseignement politique au Niger
Selon le diplomate, la DGSE était principalement concentrée sur la lutte contre les groupes armés terroristes [GAT], en partenariat avec les services de renseignement nigériens. Toutefois, M. Itté a reconnu qu’avec le recul, il aurait peut-être été judicieux d’avoir une présence plus étendue dans le pays pour mieux appréhender le paysage politique nigérien. Il a souligné un décalage important entre le président Bazoum et le reste de la société, ce qui l’aurait progressivement isolé de la réalité du pays.
Le coup d’État a pris tout le monde de court, y compris les putschistes eux-mêmes. L’implication de l’ancien président Issoufou dans cet événement a été soulignée par l’ambassadeur, laissant penser qu’il aurait été à l’origine ou complice de la destitution de son successeur.
Une des motivations du coup d’État serait liée au trafic de pétrole, contrôlé par des intérêts chinois. Le président Bazoum avait l’intention de revoir la gouvernance pétrolière pour augmenter les revenus du pays, ce qui aurait dérangé certains acteurs. La création d’une nouvelle société pétrolière, avec une majorité gouvernementale, aurait été un point de friction majeur entre le président Bazoum et Issoufou.
La Russie, bien que n’ayant pas joué un rôle direct dans le coup d’État, a mené une campagne de désinformation contre la France au Niger, alimentant un discours anti-français. Cette influence russe a été observée lors d’une manifestation devant l’ambassade de France à Niamey, organisée par un mouvement civil soupçonné de recevoir un soutien financier de Moscou.
L’attaque contre l’ambassade de France a été qualifiée d’assaut par l’ambassadeur, soulignant le danger auquel étaient exposés les ressortissants français. La situation a été finalement apaisée grâce à l’intervention du président Macron, mettant en lumière l’importance des relations diplomatiques dans de telles circonstances.
Enfin, Sylvain Itté a critiqué le manque de cohérence de certains États après le coup d’État, soulignant le double discours de certains pays, y compris les États-Unis, vis-à-vis du retour à l’ordre constitutionnel au Niger.